La sténo est un sport de combat : Populaire de Régis Roinsard

avec Romain Duris, Déborah François, Bérénice Béjo …

Rose Pamphyle, jeune fille maladroite qui tient le bazar d’un petit village de Basse-Norandie a un rêve : devenir secrétaire. Engagée à l’essai par Louis Echard, patron d’un cabinet d’assurance imbu de sa petite personne, elle se révèle lamentable dans ce nouvel exercice. Pour autant, Rose a un don que ne manque pas de remarquer notre Romain Duris national : taper à la machine avec une vitesse prodigieuse. Echard décide alors de faire de la jeune fille la nouvelle championne de vitesse dactylographique.

Il est tellement rare de pouvoir dire à la sortie d’un film que l’on se sent tout simplement heureux. Populaire, comme une douce brise, souffle avec une gracieuse légèreté sur la comédie française. Le film est agréable de bout en bout, et l’on se délecte sans ennui de ce scénario aux dialogues ciselés. On pouvait redouter la comparaison à My Fair Lady et à son couple de légende : Rex Harrison et Audrey Hepburn. Mais Populaire ne se veut pas un vulgaire produit dérivé d’outre-atlantique. Il garde toute la saveur de la comédie de George Cukor, tout en revendiquant son identité française, pas toujours facile à assumer. Et Régis Roinsard parvient à créer ce qui manque généralement au cinéma français : une vraie interaction avec le public. Le nom du film n’est pas dû au hasard : à l’image de Rose, qui est malgré les apparences très loin d’être sotte, le réalisateur ne nous prend pas pour des billes et livre une comédie sentimentale rythmée et toute en finesse. Comme quoi populaire n’est pas nécessairement synonyme de populeux, et que le cinéma français est capable de produire autre chose que le dernier Astérix. Cet humour gaulois, comme disait Jean-Louis Bory, s’efface au profit d’un mélange savamment dosé de burlesque et de cynisme. Et c’est parce que les deux personnages refusent de rester dans leur condition d’origine qu’on évite la léthargie, et l’engoncement dans le trivial et le cucufiant.

On assiste à la création d’une vraie relation d’intimité, où chacun se livre peu à peu à l’autre. Elle abandonne le stéréotype de la petite fille de province pour devenir une femme et il renonce petit à petit à jouer à l’imbuvable professeur Higgins afin de trouver qui il est vraiment. Au final, on s’amuse même des clichés, parfaitement assumés, dans une certaine tradition hollywoodienne, et on assiste en même temps que les personnages au début d’une belle histoire d’amour. En plus, le scénario ne manque pas d’originalité, et le montage des séquences de championnat retranscrit à merveille l’ambiance du concours, avec une drôlerie mélangée au stress que l’on éprouve lorsque Rose tape sur sa Triumph.

Le rôle d’Echard colle comme un gant à un Romain Duris magistral, tant dans les mimiques que dans l’attitude générale et la pétillante Déborah François, avec un charme simple et naturel, est parfaite en jeune femme amoureuse prête à tout donner pour accoucher d’elle-même. A l’heure où la question de l’égalité homme-femme est plus que jamais au centre du couple, voici un bel exemple d’apport mutuel. Fini les histoires de cocus et les couples déchirés qui dominent la planète cinéma, place à l’amour, le vrai, le grand, le beau, magique et inattendu. Love always wins. Un film qui vous fait du bien et de très loin l’une des meilleures comédies françaises de ces dernières années.

Tristan Gauthier

Commentaires et rétro-liens fermés.

Comments are closed.